La malédiction de la famille Lemp

Il existe de nombreuses histoires de malédictions, mais celle qui touche la famille Lemp est particulière. Ruine, suicides, morts accidentelles ou bizarres, manoir hanté… cette histoire regroupe toutes les ficelles de la légende sensationnelle. Mais qu’en est-il réellement ? Direction Saint-Louis, dans l’État du Missouri, aux États-Unis pour le découvrir.

La famille Lemp

Les Lemp étaient une famille très influente et riche du Missouri. Elle exploitait une brasserie qui tournait bien, tout leur réussissait. En 1858, elle fit construire son manoir, le manoir de Lemp, dans la ville de Saint-Louis, dans le Missouri, une bâtisse somptueuse, mais qui devint, quelques années plus tard, l’un des lieux les plus hantés des États-Unis. On raconte que plusieurs membres de la famille Lemp, ayant trouvé la mort dans le manoir, ne l’auraient jamais quitté. Simples ragots ou véritable phénomènes de hantise ?

Retour dans le passé pour comprendre les drames qui ont secoué la famille Lemp :

Nous sommes en 1836. Johann Adam Lemp, un Allemand habitant la ville d’Eshwege, décide de faire fortune aux États-Unis. Des rêves plein la tête, il s’installe à Saint-Louis, dans le Missouri et ouvre une petite épicerie où il y propose ses propres produits artisanaux, comme du vinaigre et de la bière qu’il fabrique lui-même selon un procédé appris par son père. Il vend donc une bière allemande, une bière qui ne va pas tarder à recevoir le succès qu’elle mérite et qui va se vendre comme des petits pains.

En 1840, Johann Lemp vend sa petite épicerie et décide de faire construire une usine, une brasserie, afin de consacrer son commerce uniquement à la bière. Il baptise cette brasserie la Western Brewery (la brasserie de l’Ouest). Bien qu’aujourd’hui à l’abandon, on peut encore voir ses murs à Saint-Louis.

Les premières années, cette usine fabriquera de la bière artisanale qui sera distribuée dans les pubs locaux. Johann Lemp commence alors à tester de nouvelles recettes, et présente la Lager, une bière allemande légère, inconnue en Amérique qui va devenir très populaire durant les années 1845. Les demandes affluèrent, les carnets de commandes étaient complets, l’usine tournait à plein régime et peinait à satisfaire les demandes, à tel point que Lemp décida d’agrandir son usine. Il acheta la grotte calcaire au sud de la ville de Saint-Louis. L’endroit était naturellement frais et spacieux pour entreposer les fûts de bière et les laisser fermenter le temps nécessaire. On y faisait venir des blocs de glace l’été pour rafraîchir les différentes pièces de la grotte.

Vers 1850, l’entreprise de Lemp, la Western Brewery, était devenue l’une des plus importantes de Saint-Louis.

Johann Adam Lemp avait un fils, William. C’est lui qui reprit la société lorsque son père disparut en 1862. Le père avait réussi à faire prospérer la Western Brewery, William allait la conduire à son apothéose en y apportant la modernité de son époque. En effet, les ouvriers acheminaient la bière par wagons de l’usine au point de fermentation et de stockage qu’était la grotte. Cette opération était fastidieuse, difficile et coûteuse. William décida d’acheter les terrains autour de son entrepôt souterrain afin d’y construire une nouvelle usine. Cette usine accueillera les bureaux administratifs, une fabrique de glace et une usine d’embouteillage. 

Durant l’année 1861, William Lemp épouse Julia Feickert, une riche héritière. William Lemp aide, alors, son beau-père à construire un magnifique manoir, bâtisse qu’il rachètera plus tard. Le couple s’y installera en 1876. Le manoir est luxueux et dispose de toutes les commodités modernes de l’époque, et surtout, un tunnel le relie à la brasserie. C’est le fameux manoir Lemp qui attirera bien des curieux quelques années plus tard.

En 1878, William fait installer une chambre réfrigérée à l’intérieur de son usine, et libère la grotte qu’il transforme en auditorium où le couple donne des représentations privées. 

William et Julia Lemp eurent huit enfants : Anna, William Jr., Louis, Charles, Frederick, Hilda, Edwin et Elsa.

En 1892, William décida de prendre sa retraite et confia son entreprise à ses fils.

En 1895, la Western Brewery employait sept cents personnes (autant dire qu’elle faisait pratiquement vivre la quasi-totalité des habitants de Saint-Louis) et sortait 300 000 barils par an qui étaient vendus dans tout le pays, mais aussi en Europe. 

En 1901, Frederick Lemp, le plus jeune des frères et le fils préféré, tomba malade et dut partir en Californie pour se soigner. Malgré tous les soins possibles, il mourut à l’âge de 28 ans d’une insuffisance cardiaque. Mais, et c’est le début de la légende qui entoure la famille Lemp, on raconte qu’il est mort dans des circonstances étranges. Bien sûr, personne n’a jamais pu apporter de preuves. Cette disparition fut un véritable drame pour ses parents et plus encore pour William qui ne se remit jamais de cette perte. Il commença à s’isoler et ne voulut plus voir personne. En 1904, son ami et beau-père de sa fille Hilda disparaît à son tour. Cette tragédie le plongea dans un profond désespoir. On raconte qu’il restait des journées entières assis à son bureau, le regard dans le vague et que ses mains faisaient d’étranges mouvements.

Au matin du 13 février 1904, après le petit-déjeuner, William se retira dans sa chambre en prétextant une grande fatigue. Vers 9 h 30, il s’allongea sur son lit et se tira une balle dans la tête avec son pistolet. Il ne mourut pas sur le coup, mais quelques heures plus tard. Ce fut un drame terrible pour la famille Lemp, le second.

Ce fut l’aîné de la famille, William Jr, qui devint président de la Western Brewery, une nouvelle fonction qui ne l’intéressait pas. Il avait épousé Lilian Handlan, une riche héritière, et préférait se payer du bon temps avec l’argent de sa femme plutôt que de travailler à l’usine. William Jr., tout comme sa femme, aimait à se montrer à des soirées mondaines, aimait se pavaner et montrer sa fortune. Le couple dépensait beaucoup d’argent pour soigner son image, en voitures (il en avait 7, une pour chaque jour de la semaine), en apparats, en maisons de campagne, en œuvres d’art, en costumes et robes. Le couple eut un fils unique, William III. Mais très vite, William Jr commença à se lasser de son épouse et organisa des parties d’orgie dans les grottes de son manoir invitant les aristocrates et faisant venir des prostituées. La chose se savait dans tout Saint-Louis et l’on guettait le moment où Lilian finirait par demander le divorce. Mais contre toute attente, ce fut William Jr. qui le demanda et accusa sa femme de blasphème. Il accusa aussi sa femme de vouloir porter toujours l’attention sur elle en s’habillant avec des toilettes de couleur lavande. En effet, Lilian aimait beaucoup cette couleur et toutes ses robes étaient lavande. Mais pour William Jr., cela constituait une infraction au code de bonne conduite. Lilian, bien sûr, se défendit et accusa, à son tour, son mari de la tromper. Elle révéla même qu’il la battait et qu’il l’avait menacé de la tuer. Elle se plaignit aussi qu’il la privait de sa liberté en lui ordonnant de ne pas sortir de la propriété.

Les procédures judiciaires de ce divorce hors norme provoquèrent un énorme scandale qui passionna les habitants de Saint-Louis. Chaque jour, les curieux s’agglutinaient devant les portes du tribunal pour suivre les audiences. Les journalistes en faisaient les gros titres des journaux et chacun y allait de son commentaire.

C’est durant ce procès que l’on apprit des choses pour le moins surprenantes et bizarres : William Jr. aimait organiser des combats de poulets contre… des singes ! Et il obligeait son fils à les regarder. Un jour, la vision d’un singe dévorant vivant un poulet traumatisa l’enfant. De plus, William Jr. se baladait souvent avec un pistolet sur lui et n’hésitait pas à le pointer vers les domestiques lorsqu’ils ne travaillaient pas assez vite à son goût. Il tirait aussi sur les chats. Pour sa défense, William Jr. avait répondu qu’il ne faisait pas cela pour le plaisir, mais pour faire taire les chats qui se battaient la nuit et qui le réveillaient.

Pendant ce temps, Julia Lemp, la mère de William Jr., contracta un cancer. Elle mourut dans d’atroces souffrances en 1906, dans la chambre où son mari s’était donné la mort. Ce fut le troisième drame de la famille Lemp. La même année, neuf des plus grandes brasseries de la région se réunirent pour former une seule société, et ainsi concurrencer dangereusement l’entreprise familiale. Mais William Jr. ne s’occupa pas de ses affaires et ne fit rien pour faire développer davantage la Western Brewery et pour contrer le développement des autres sociétés. Au contraire, il continua à dépenser sans compter et acheta une maison de campagne en 1911 afin de s’éloigner de Saint-Louis. Il fit quelques travaux dans l’usine, mais l’équipement était fatigué, et William Jr. ne voulut pas le rénover ou le remplacer par des équipements plus modernes.

En 1913, le divorce fut prononcé. William Jr. perdit la garde de son fils et fut condamné à verser une pension de 6000 dollars par an à sa femme. Lillian fit appel à cette décision à la Cour Suprême du Missouri qui fixa la pension à 100 000 dollars par an, ce qui fut, à l’époque, la plus grosse somme jamais attribuée auparavant dans un divorce.

Lorsque la Première Guerre mondiale éclata, ce fut le coup de grâce à la Western Brewery déjà à bout de souffle. Lorsqu’en 1919 un amendement de la Constitution américaine proclama la prohibition, amendement qui fixa l’interdiction de fabriquer, de vendre et de transporter des boissons alcoolisées, la société de la famille Lemp fut perdue. William Jr. tenta un sauvetage désespéré en brassant une bière sans alcool, mais cela fut insuffisant. Et la même année, il décida de fermer brusquement l’usine, sans même prévenir les employés qui trouvèrent porte close lorsqu’ils voulurent prendre leur poste. Aucun des enfants Lemp ne se soucia du sort de l’usine, aucun ne voulut se battre pour sauver l’entreprise familiale. On raconta qu’ils étaient tellement riches et qu’ils méprisaient tellement les pauvres et les ouvriers qu’ils n’avaient aucune envie de se battre pour eux.

Ce qui n’était pas totalement faux : en effet, Elsa Lemp avait épousé Thomas Wright, un industriel, mais son couple battit de l’aile et elle demanda le divorce après neuf années de mariage. Elle déclara que son mari avait détruit sa vie, sa paix et son bonheur. Plus tard, le couple s’était réconcilié et s’était remarié en 1920. Peu de temps après, Elsa prétexta une mauvaise nuit et resta au lit. Mais, elle se tira une balle dans la tête, comme son père quelques années auparavant. Ce fut le quatrième drame de cette famille. Durant l’enquête, Thomas Wright se montra très agité et passa son temps à fuir les inspecteurs. On ne sut jamais pourquoi…

Après la fermeture de l’usine, William Jr. Lemp s’enfonça dans la dépression. Il avait vendu l’usine pour quelques milliers de dollars, alors que la brasserie en valait au moins 7 millions avant la prohibition. Tout comme son père avant lui, il commença à se montrer nerveux et fuyait la vie publique. Il se plaignait constamment de douleurs diffuses, et de maux de tête. Le 29 décembre 1922 au matin, après une discussion avec sa femme, William Jr. se suicida d’une balle en plein cœur, comme son père et sa sœur avant lui. Ce fut le cinquième drame de la famille Lemp. Lui aussi ne mourut pas de suite, mais quelques heures plus tard, dans d’atroces souffrances.

C’est son fils unique qui découvrit son corps. Il dira aux enquêteurs qu’il avait pressenti le geste de son père qui parlait sans arrêt de solder ses affaires et de voyager en Europe pendant quelque temps.

En 1933, à la fin de prohibition, William III tenta de redresser l’affaire familiale, et signa un accord avec la brasserie de Saint-Louis, qu’il rebaptisa la William J. Lemp Brewing Compagny. Mais, même si les chiffres furent encourageants au début, l’entreprise coula un an et demi plus tard. La banque saisit sa maison et sa femme le quitta. En 1943, à l’âge de 42 ans, William III décéda d’une crise cardiaque. Ce fut le sixième drame qui toucha la famille Lemp.

À la même époque, Charles et Edwin Lemp, les deux frères restants de la famille Lemp, qui habitaient à Saint-Louis et qui avaient travaillé à la brasserie, se terraient dans leur demeure. Leur fortune amassée lorsque la brasserie tournait plein pot les avait laissés à l’abri du besoin. Edwin s’était retiré dans une grande maison de campagne où il vivait en reclus. Charles, quant à lui, s’impliquait dans la vie politique de sa ville, il semblait bien intégré dans la société, même si on disait qu’il était quelqu’un de mystérieux et parfois bizarre. Les gens se méfiaient de lui et l’évitaient.

En 1939, alors que son frère avait déserté le manoir, Charles s’y installa. Comme il n’était pas marié, il y vécut seul, avec son chien et ses serviteurs. On raconte que Charles était hypocondriaque. Il avait tellement peur des microbes qu’il portait des gants pour s’en protéger. En 1941, Charles rédigea son testament et fit parvenir les instructions pour ses obsèques au salon funéraire de Saint-Louis. Il demanda à ce que son corps ne soit ni lavé, ni modifié, ni maquillé, ni habillé, et que quoi que sa famille puisse exiger, aucun service ne soit tenu et qu’aucun avis de décès ne soit publié. Son corps devra être transporté directement au crématoire et ses cendres placées dans une urne en osier et enterrées dans le jardin de son manoir.

Au fil des ans, Charles devint solitaire au point de plus vouloir quitter le manoir, de ne plus vouloir voir du monde. Edwin, parfois, l’invitait à passer une journée en sa compagnie, mais Charles trouvait toujours un prétexte pour ne pas sortir de chez lui. Et Charles mourut seul, dans son manoir. On découvrit son corps quelques jours après sa mort, on le retrouva allongé sur le lit, un revolver dans la main droite, le visage explosé. Sur la table de chevet, on retrouva une lettre dans laquelle Charles demandait à ce que personne ne soit blâmé pour son geste. Les inspecteurs retrouvèrent son chien dans la cave. Charles l’avait tué d’une balle avant de se suicider à son tour.

Edwin fut prévenu et arriva le lendemain du drame au salon funéraire où les cendres de son frère lui furent remises. Afin de respecter les dernières volontés du mort, Edwin transporta l’urne au manoir et l’enterra dans le jardin. Bizarrement, et malgré des fouilles, on ne le retrouva pas.

Après la mort de son frère, Edwin vendit le manoir et retourna dans sa maison de compagne où il coula des jours heureux. Mais on raconta que plus il vieillissait, plus il devenait étrange. Il ne voulait jamais rester seul, avait toujours besoin de quelqu’un dans la maison pour le rassurer. Jamais il ne parla de sa famille, pensant peut-être que le silence éloignerait la malédiction qui planait sur elle. Il s’éteignit à l’âge de 90 ans, en 1970, dans son sommeil. On pensa que s’il avait vécu aussi longtemps, c’est parce qu’il s’était tenu éloigné du manoir. Sa dernière demande fut très étrange : Edwin avait demandé qu’à sa mort, tous ses objets de collection, amassés au fil du temps, devaient être détruits sans exception. Certains de ces objets d’art valaient une petite fortune. Mais Edwin avait avoué un jour qu’il craignait que la malédiction des Lemp s’attache à l’un de ces objets et touche le futur acquéreur. Et c’est ainsi que partit en fumée ce qui restait de l’empire des Lemp.

Un manoir hanté

Les rumeurs concernant une possible hantise du manoir commencèrent dès sa vente par Edwin. Déjà, à Saint-Louis, les rumeurs allaient bon train concernant cette bâtisse. On raconta que des bruits bizarres résonnaient constamment dans la maison et gênaient les nouveaux propriétaires. Puis, la rumeur enfla et le manoir devint le sujet principal des conversations de « bistrot ». Chacun y allait de son commentaire, chacun déformait ce qu’il avait entendu, amplifiait le phénomène. C’est comme cela que se construit une légende.

Mais cela ne fit pas les affaires des nouveaux propriétaires qui avaient transformé le manoir en pension de famille et qui peinaient à trouver des clients. Personne ne voulait dormir dans un endroit hanté. Et l’argent commença à manquer, au point que les propriétaires ne pouvaient plus entretenir le manoir qui se délabrait d’année en année pour enfin se résoudre à le vendre.

En 1975, c’est un dénommé Richard Pointer qui acheta le manoir pour en faire un hôtel-restaurant. Il fit faire d’énormes travaux pour lui redonner sa splendeur d’antan. La rénovation coûta une petite fortune et les travaux ne furent pas de tout repos. En effet, de nombreux ouvriers se plaignirent de sentir des présences les observer. Ils se plaignirent aussi de disparitions d’outils, de bruits étranges, de déplacements d’air… Certains quittèrent le chantier sans demander leur reste.

Richard Pointer embaucha un artiste local, Claude Breckwoldt pour restaurer les plafonds peints à la main du manoir. Un jour, alors qu’il était sur l’échafaudage, couché sur le dos, et qu’il peignait le plafond de la salle à manger, il a eu le sentiment que quelqu’un l’observait. Il a regardé autour de lui, il n’y avait personne. Une heure plus tard, à nouveau, il a ressenti comme un regard insistant posé sur lui. Il prit peur et dut sortir de la maison. Plus tard, il dit à Richard qu’il y avait quelque chose dans la maison, quelque chose qui l’avait effrayé.

Voici une autre histoire étrange rapportée par le fils de Richard Pointer, Dick. Un jour, ce dernier passa une nuit au manoir avec son chien, un magnifique doberman. Soudain, en pleine nuit, le bruit d’une détonation qui semblait provenir de derrière la porte de sa chambre le réveilla en sursaut. Dick fouilla le manoir, en vain.

Finalement, et malgré toutes ces péripéties et ces retards, l’établissement ouvrit ses portes et ce fut au tour du personnel et des clients de narrer leurs expériences bizarres au manoir. Tous racontèrent des phénomènes étranges, des bruits bizarres, des objets qui lévitaient, des lumières qui s’éteignaient et s’allumaient seules, des tiroirs qui s’ouvraient seuls, des portes qui claquaient. Certains ont même entendu des voix et des hennissements de chevaux. Un soir, Dick, qui fermait le restaurant du manoir avec un employé, entendit quelques notes jouées au piano alors que personne n’était assis devant pour le faire fonctionner.

Alors bien sûr, on se doute bien que de nombreux employés démissionnèrent, peu voulurent travailler dans un lieu hanté. Ce fut le cas de Bonnie Strayhorn qui raconta son aventure surnaturelle aux médias. Un matin très tôt, la jeune femme s’affairait au restaurant afin de s’assurer que tout était en ordre pour son ouverture aux clients. Soudain, son regard fut attiré vers une ombre dans un coin de la pièce. Elle tourna la tête et vit qu’un homme aux cheveux noirs était attablé dans ce qui avait été, jadis, la salle à manger des Lemp. Surprise de voir quelqu’un aussi tôt au restaurant, Bonnie Strayhorn lui avait demandé s’il voulait un café. Mais l’homme n’a pas répondu, et Bonnie haussa les épaules et reprit son tour d’inspection. Mais lorsqu’elle se retourna pour regarder l’homme, il n’était plus, disparu comme par enchantement. Bonnie démissionna le jour même, cette expérience était celle de trop.

À force de recueillir des témoignages, le manoir fit la Une des journaux locaux. Le magazine Life affirma même qu’il était l’un des neuf lieux les plus hantés d’Amérique ! Ce qui bien sûr, comme c’est toujours le cas dans ce genre d’histoire, eut comme conséquence d’attirer de nombreux curieux et autres « chasseurs de fantômes » en mal de sensation forte. On mena plusieurs enquêtes à l’intérieur du manoir, mais dans ce genre d’histoire il est très difficile de démêler le vrai du faux.

Aujourd’hui, le manoir est toujours un hôtel-restaurant, une auberge luxueuse qui accueille ses clients dans un décor atypique. Les propriétaires de ce lieu à l’histoire chargée ont mis en place des horaires de visites afin de contenter les curieux et les amateurs de paranormal. Les enquêteurs ont délimité trois zones où les phénomènes paranormaux seraient plus présents : l’escalier, le grenier et le passage souterrain, celui qui reliait le manoir à la brasserie. Les « chasseurs de fantômes » ont surnommé ce passage « Les Portes de l’Enfer ». Ridicule ! (ceci est bien sûr mon avis, mais toutes ces enquêtes de pacotille qui décrédibilisent le paranormal et les vrais enquêteurs me fatiguent)

Julia, la femme de William, qui mourut d’un cancer dans le manoir, hanterait le deuxième étage, où plusieurs témoins l’ont vue sous l’apparence d’une dame blanche. Elle chercherait son fils Zeke, dernier né de la famille qui serait mort à l’âge de 16 ans d’une chute dans les escaliers. Encore une fois, on ne sait pas si cette histoire est vraie ou si elle fait partie de la légende. D’ailleurs, on raconte que ce fils, Zeke, serait né malformé et que les Lemp l’auraient caché pour préserver la réputation de la famille.

On raconte aussi que les domestiques habitaient le grenier et qu’ils aimaient Zeke, qui dormait d’ailleurs souvent avec eux. Zeke hanterait le grenier alors que sa mère le cherche au deuxième étage et jamais ils ne se croisent ! Une autre histoire, plus cynique fait de Zeke le fils illégitime de William Jr et d’une servante ou une prostituée (en fait, on ne sait pas trop !). Pour ne pas faire de vague, William Jr aurait caché ce fils « de la honte » dans le grenier, et ce serait Charles et Edwin qui l’auraient élevé avec deux serviteurs. Mais Zeke aurait voulu, un jour, alors qu’il avait 16 ans, fuir le grenier et se serait tué en chutant dans les escaliers.

Ajoutons encore quelques faits bizarres à cette légende : plusieurs visiteurs ont rapporté entendre des voix d’enfants dans la maison, des enfants demandant de l’aide ou de venir jouer. Au rez-de-chaussée, là où se trouvent les toilettes pour dames du restaurant, qui étaient l’ancien bureau de William Jr., plusieurs femmes ont raconté avoir vu un homme regarder furtivement sous la porte et disparaître. De la chambre de William, plusieurs clients de l’auberge auraient entendu quelqu’un courir dans l’escalier et frapper à la porte. On raconte que le jour où William Lemp se serait suicidé dans cette même chambre, son fils William Jr. avait monté les escaliers quatre à quatre et aurait donné des coups de pieds à la porte verrouillée de la chambre. Donc, cette scène se reproduirait inlassablement, toujours et encore !

Certains ont entendu des pleurs venant de la grotte, où de nombreuses cavernes servaient à l’entreposage des fûts de bière. Ici, l’activité paranormale serait particulièrement forte. Selon la légende, et encore une fois, nous n’avons aucune preuve de cette histoire, avant que la famille Lemp ne construise leur manoir, un jeune couple d’Amérindiens se seraient cachés dans grotte pour faire leur petite affaire et s’y seraient perdus. Ils y auraient perdu la vie, morts de faim. Certains enquêteurs auraient découvert des ossements…

Sachez, chers lecteurs, qu’une légende nait que si elle est propagée et amplifiée. Derrière chaque légende se cache une part de vérité, et c’est cette part-là que nous allons tenter de découvrir avec les quelques éléments que nous avons en notre possession.

En attendant, et pour ceux qui veulent s’offrir un voyage dans le Missouri, sachez que le manoir Lemp est aujourd’hui une superbe auberge, mais, et cela est mon avis, n’est pas hantée.

Résumons et réfléchissons

C’est en 1839 que Johann Adam Lemp quitte son Allemagne natale pour s’installer aux États-Unis où il ouvre un petit commerce. En 1840, il fonde la Western Brewery, une brasserie artisanale qui va connaître un succès florissant.

C’est son fils William Lemp qui va reprendre l’affaire familiale en 1862 et qui la modernisera et la fera fructifier. William est marié à Julia Feickert et ensemble ils auront 8 enfants :

  • Anna
  • William Jr.
  • Louis
  • Charles
  • Frederick
  • Hilda
  • Edwin
  • Elsa

Retenons ces noms, chers lecteurs, ils nous seront utiles pour comprendre cette histoire.

Le couple fait bâtir le manoir et s’y installe en 1876. À cette époque, la brasserie Western Brewery tournait à plein régime et la bière Lemp était exportée partout dans le monde. William Lemp avait fait de son entreprise une société à la renommée internationale, une des plus grandes entreprises du Missouri.

Jusqu’à présent tout réussissait aux Lemp, mais les malheurs vont très vite arriver, car souvenez-vous, chers lecteurs, le succès n’arrive qu’après le travail ou après un pacte démoniaque. À votre avis, est-ce que William aurait fait appel au diable pour l’aider à agrandir sa société ? La suite nous le dira.

En 1862, William prend sa retraite et confie la Western Brewery à ses fils. Ce sera William Jr. qui va le plus s’en occuper.

En 1901, Frederick Lemp, le fils préféré de William, meurt à l’âge de 28 ans d’une insuffisance cardiaque. C’est le premier drame de la famille Lemp. Ne se remettant pas de cette perte, William Lemp se donne la mort en 1904 en se tirant une balle dans la tête. C’est William Jr. qui découvrira le premier son père gisant dans une mare de sang dans son lit. William est donc le premier suicidé de la famille Lemp. Or, un suicide n’est jamais anodin, il est le résultat d’un geste désespéré. Sachez chers lecteurs, que dans un suicide, le diable n’est jamais loin. C’est lui qui vous fait appuyer sur la gâchette. C’est lui qui met un voile de ténèbres devant vos yeux afin que vous ne puissiez plus voir la lumière, qui exacerbe vos peines, qui vous précipite dans la désolation. Le diable se sert de vos faiblesses, de vos peines pour mieux vous détruire. Rappelons-nous qu’avant son passage à l’acte, William s’isolait et passait ses journées assis à son bureau, le regard dans le vague. Ses mains faisaient des gestes étranges, sans qu’il puisse les contrôler. Nous pouvons penser qu’il s’agit là d’un des symptômes de la possession démoniaque.

Voilà mon avis : je pense que William Lemp, en voulant faire fructifier son affaire, en s’intéressant trop à l’argent, s’est approché trop près du Diable et ce dernier, dès qu’il en a eu l’occasion, en a profité pour s’immiscer dans son esprit. La perte d’un enfant est douloureuse, si douloureuse qu’il est difficile pour un parent de l’accepter. Cela a été le déclencheur. Si William a passé un pacte avec le démon, même implicite, sans le savoir, simplement en priant gagner toujours plus d’argent, alors, il a fait venir le malheur dans sa famille. Et c’est ainsi que naît une malédiction. Voyons la suite de l’histoire pour affiner nos remarques.

Deux ans après suicide de William Lemp, sa femme Julia a succombé au cancer qui rongeait son corps. Elle est morte au manoir, dans d’atroces souffrances dont elle fut délivrée lorsqu’elle expira son dernier souffle.

C’est William Jr, l’aîné de la famille Lemp, qui s’occupa le plus de la Western Brewery, les autres fils s’en désintéressent et ont préféré vivre de la fortune familiale. William Jr fut décrit comme un personnage aux mœurs bizarres : il organisait des orgies dans les cavernes de la grotte ainsi que des combats de singes et de poulets ! Pouvons-nous en déduire qu’il avait un esprit relativement tordu ? En tout cas, il était torturé. Et plus les années ont passé, plus il s’est enfoncé dans la luxure et plus il a délaissé l’affaire familiale, au point de la mener à la banqueroute. William Jr dépensait sans compter. Marié une première fois, il menait la grande vie. Son divorce intéressa toute la ville, et les rumeurs à son sujet se répandirent à la vitesse d’un TGV lancé à grande vitesse. Après son divorce, et la ruine de son entreprise, William Jr. s’enfonça dans la dépression et finit par se suicider d’une balle en plein cœur en 1922. Il s’était plaint, à plusieurs reprises, de maux divers et s’était enfermé chez lui, refusant de voir du monde. On peut y voir, dans ces souffrances, l’œuvre d’un démon.

Avant cela, Elsa Lemp, la dernière née de la famille Lemp, qui avait épousé un riche industriel, se suicida en 1920 d’une balle dans la tête.

En 1933, William troisième du nom, le fils de William Jr., tenta de redresser l’affaire familiale, en vain. Il perdit sa maison et sa femme le quitta. Il succomba, à l’âge de 42 ans, d’une crise cardiaque. Si l’on rapproche cet évènement au décès de Frederick Lemp, qui lui aussi avait un cœur fragile, on peut se demander si une malformation cardiaque congénitale ne touchait pas les Lemp.

Enfin, on sait que Charles et Edwin Lemp vivaient en reclus. À la mort de son frère William Jr., Charles s’installa au manoir et se donna, lui aussi, la mort par balle. Lui aussi avait sombré dans la désolation. Et ses dernières volontés furent très étranges : pas de cérémonie, on ne devait pas habiller son corps, et ses cendres devaient être enterrées dans le jardin du manoir. Edwin vendit le manoir et c’est à partir de là que l’on commença à parler de la hantise du manoir des Lemp.

Quant aux autres enfants de la famille Lemp, Louis et Hilda, on ne sait pas ce qu’ils sont devenus.

Plusieurs membres de la famille Lemp se sont suicidés, ce qui est déjà une malédiction en soi. Je pense que William Lemp a passé un pacte avec le démon, implicitement ou consciemment, afin d’obtenir la richesse, chose qu’il a obtenue. Mais un tel pacte n’est jamais anodin. Il y a toujours un prix à payer. Et le prix, c’est une malédiction qui a touché non seulement William, mais tous les membres de la famille. Ensuite, les gens ont commencé à parler, souvent à tort et à travers. Les gens sont très friands de ce genre d’histoire. Et l’on a commencé à parler de fantômes qui hanteraient le manoir Lemp.

Or, je ne pense pas que le manoir soit hanté. Tout cela n’est que de la suggestion. À force de parler de fantômes, les gens se persuadent voir un fantôme.

D’ailleurs, Edwin Lemp avait bien compris que la malédiction qui touchait les Lemp n’avait rien à voir avec le manoir : il avait détruit les objets appartenant à sa famille pour éviter que la malédiction touche un possible futur acquéreur.

Sachez que les phénomènes de hantise sont très rares. Le démon ne s’attache pas à un lieu ou à une maison, mais à une personne. Dans de rares cas, parfois le démon tient prisonnier l’âme de sa victime dans le lieu du suicide, et c’est cette âme qui se manifeste et qui cherche de l’aide. Et si l’on s’y frotte, on rencontre alors un démon. Et là les ennuis commencent.

Aujourd’hui, les émissions sur les lieux hantés attirent de plus en plus de spectateurs. Ce sont des émissions à sensation. Mais la plupart du temps, tout est faux, tout est truqué. Et le lieu n’est pas hanté. C’est le cas pour le manoir Lemp. Ce lieu a fait le bonheur des « chasseurs de fantômes », mais ces gens ne comprennent pas que non seulement ils décrédibilisent le paranormal, mais en plus, qu’à force de jouer avec le feu, ils finissent par allumer un incendie. Car, à force de vouloir chercher des fantômes, ils tombent sous les griffes d’un démon qui va se faire un malin plaisir de les torturer. Et à force d’inventer des histoires rocambolesques, ils finissent par ne plus être pris au sérieux.

Dans le cas du manoir Lemp, ce n’est pas le manoir qui est en cause, mais bien la famille Lemp. Mais les gens ont préféré mettre en avant une bâtisse, plutôt que de rechercher la malédiction, qui elle, n’aurait pas attiré les curieux.

J’en profite pour faire passer un message coup de gueule à tous ces « investigateurs » de pacotille qui pullulent sur la toile, à toutes ces émissions stupides qui ne sont là que pour faire du chiffre, toutes ces pratiques font plus de mal que de bien à ceux qui prennent au sérieux le paranormal, à ceux qui essaient vraiment d’aider les gens. Car à force de faire du n’importe quoi, on finit par rendre risible le tout. À bon entendeur.

Sources : dossiersparanormal.fr

 

Marie d’Ange

 

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