Evil Dead 1981, le Book of the Dead

Dans cet article, je vous propose que l’on s’intéresse au film de Sam Raimi, le fameux Evil Dead que tous les fans de films d’horreur connaissent. Ce film connu sous différentes appellations, La Nuit des démons ou l’Opéra de la terreur a révolutionné le genre. Deux suites ont été réalisées par Sam Raimi lui-même (des chefs d’œuvre), une série aussi avec toujours le même acteur dans son propre rôle, ainsi qu’un reboot dont je m’abstiendrai d’en parler, car je n’ai vraiment pas adhéré. Faisons le tour de ce film mythique qui a donné naissance à un autre genre de films d’horreur.

 

 

Fiche technique et distribution

 

 

Nationalité : américaine

Titre original : The Evil Dead

Titre français : Evil Dead ou La Nuit des démons en VHS

Titre québécois : L’Opéra de la terreur

Réalisateur et scénariste : Sam Raimi

Maquillage : Tom Sullivan

Effets visuels : Bart Pierce

Photographie : Tom Sullivan

Musique : Joe Loduca

Montage : Edna Ruth Paul, Joel Coen

Producteurs : Robert Tapert, Bruce Campbell et Sam Raimi

Budget : 350 000 dollars

Genre : horreur, fantastique

Durée : 82 min pour la version censurée et 85 min pour la version intégrale

Dates de sortie : 15 avril 1983 aux États-Unis (sortie nationale), le 22 avril 1983 au Canada, le 24 août 1983 en France

Film interdit aux moins de 12 ans à sa sortie en France.

       

Avec :

  • Bruce Campbell dans le rôle d’Ashlay « Ash » J. Williams
  • Ellen Sandweiss dans le rôle de Cheryl
  • Richard DeManicor dans le rôle de Scott
  • Betsy Baker dans le rôle de Linda
  • Theresa Tilly dans le rôle de Shelly

À noter que c’est Sam Raimi qui fait la voix de l’Esprit du mal.

 

Box-office et distinctions

 

La jaquette VHS

 

En France, le film a fait 50 000 entrées et a rapporté 9 800 000 dollars.

Au Festival International du film, Evil Dead a reçu le prix des meilleurs effets spéciaux pour Tom Sullivan et le prix de la critique pour Sam Raimi.

Le Saturn Awards 1983 a élu Evil Dead le meilleur film à petit budget.

 

Synopsis

Un groupe d’amis, composé de deux couples et d’une amie, part en vacances dans une cabane isolée en forêt. Dès leur arrivée, des phénomènes étranges se produisent, ce qui va les amener à fouiller la cave sombre de la maison. Ils y découvrent un livre, le Necronomicon ou le Livre des Morts, relié en peau humaine et écrit avec du sang, ainsi qu’un magnétophone contenant un enregistrement d’un archéologue. Le groupe, curieux, décide d’écouter cet enregistrement où l’archéologue raconte ses trouvailles et où il récite une incantation se trouvant dans le livre. Cette incantation va réveiller d’antiques forces démoniaques. Et c’est le cauchemar assuré pour la bande de potes venus passer des vacances paisibles.

 

Autour du film

 

 

Initialement, le tournage ne devait que durer 6 semaines, mais a finalement duré 12 semaines. Le film a été tourné du 14 novembre 1979 à janvier 1980 à Morristown et Knoxville dans le Tennessee et à Détroit et Marshall dans le Michigan.

Sam Raimi avait 20 ans lorsqu’il écrivit et réalisa Evil Dead. Initialement, le film devait s’intituler Book of The Dead, intégralement, Le Livre des Morts, mais le producteur Irvin Shapiro a modifié le titre, qu’il ne trouvait pas assez vendeur et attirant pour un public d’adolescents et a choisi Evil Dead.

Pour ce film, Sam Raimi donne un nouveau souffle, innove la technique de la « Shaky camera », système qui permet à la caméra d’être tout le temps en mouvement, donnant ainsi au film la dimension particulière qu’on lui connaît.

À la cave, les spectateurs ont pu voir une affiche du film « La colline a des yeux », petite référence à Wes Craven, un réalisateur que Sam Raimi adore.

La cabane, où se déroule l’intrigue du film, se trouve dans une forêt du Tennessee. C’est une cabane donc réelle et non fabriquée en studio. Quant à la cave, c’est tout simplement la cave de celle de la maison des parents de Robert Tapert, un des producteurs.

La voiture d’Ash, une Oldsmobile Delta 88, est la propre voiture de Sam Raimi. On la retrouve de façon récurrente dans la plupart de ses films, et notamment dans la série Ash vs Evil Dead.

Le film est à petit budget et ce budget ne fut pas facile à collecter. Ainsi, un court métrage de 30 min, intitulé Within the Woods, basé sur le scénario d’Evil Dead, a été tourné par Raimi afin de réunir des fonds pour le financement du film.

Lors de sa sortie en salle en France, le film a été doublé. Mais mal doublé. En effet, il a été noté quelques erreurs de traduction. Par exemple, lorsque Ashley et Scott, après avoir tué leur amie, disent en français « Allons brûler le corps… » et qu’ils vont l’enterrer. C’est une petite incohérence. Heureusement, le film a été redoublé en 2003 pour la seconde version et ces erreurs ont été corrigées.

Le VHS du film s’est vendu à plus de 50 000 exemplaires. Sur la jaquette, on pouvait y lire une citation de Stephen King qui faisait une critique plus qu’élogieuse du film.

 

La trilogie

Evil Dead est en fait une série de films d’horreur, tous créés par Sam Raimi, qui se compose de trois films :

  • Evil Dead, sorti en 1981
  • Evil Dead 2, sorti en 1987
  • Evil Dead 3, sorti en 1992.
La comédie musicale Evil Dead

 

Une comédie musicale inspirée de cette trilogie a également été mise en scène avec l’approbation de Sam Raimi et de Bruce Campbell, s’intitulant Evil Dead : The Musical.

La première s’est jouée le 14 août 2003, lors de la grande panne de courant nord-américaine de 2003. La comédie musicale s’est alors jouée en extérieur, les musiciens ont joué les morceaux en acoustique et les comédiens ont fait les bruitages en coulisse à la bouche. Et lorsque la nuit a commencé à tomber, les comédiens ont fini la pièce éclairée par des phares de voiture.

Le 2 octobre 2006, la pièce se joua à New York, puis jusqu’à 8 fois par semaine au New World Stages jusqu’au 17 février 2007, tant elle avait du succès.

Fidèle à la trilogie Evil Dead, la pièce fait gicler beaucoup de sang. À la fin, le comédien interprétant Ash se retrouve couvert de faux sang, ainsi que les spectateurs. Les places des trois premiers rangs ont donc été vendues sous l’appellation « splatter zone », entendez par là, la zone d’éclaboussure. Et les fans ayant acheté ces places étaient venus avec des T-shirts blancs, histoire de rapporter un souvenir dégoulinant chez eux. Plus tard, des T-shirts blancs arborant la petite phrase « I survived the Splatter Zone » (j’ai survécu à la zone d’éclaboussure) ont été vendus à l’entrée et ont rencontré un immense succès.

Le 26 juin 2008, le spectacle a fêté sa 300e représentation à Toronto.

En ce qui concerne le reboot, réalisé par Fede Alvarez et sorti en 2013, je ne m’attarderai pas dessus. Tout simplement parce que je n’aime pas les reboot. Je l’ai vu, mais il m’a laissé une curieuse impression de nullité. En plus, l’histoire n’a pas été respectée. Je préfère vous parler, chers lecteurs, de la série.

 

La série Ash vs Evil Dead

 

Cette série est très récente puisqu’elle date de 2015. J’ai eu la chance de la regarder en VO, donc je peux vous en parler.

J’ai adoré.

Cette série, réalisée par Sam Raimi, fait suite à la trilogie. On retrouve Bruce Campbell dans le rôle d’Ash et tout le génie de l’acteur et du réalisateur qui a fait le succès du film.

Bien sûr, Bruce Campbell a pris quelques rides et un peu de brioches, mais la magie reste intacte. On le voit avec sa tronçonneuse découpant les têtes des deadites, on voit le Livre des Morts. Le sang gicle toujours autant et l’humour est toujours au rendez-vous.

Je conseille cette série à tous les fans d’Evil Dead, vous ne serez pas déçu.

 

Histoire, analyse et critique du film

Pourquoi ce film est-il devenu mythique ? Tout simplement parce qu’il est né de l’imagination d’un jeune metteur en scène, Sam Raimi, élevé au ComicBook et portant un amour immodéré à Chuck Jones et aux Three Stooges.

À l’âge de 16 ans, Sam Raimi rencontre Bruce Campbell, avec qui il partage la passion des ComicBook. Les deux hommes vont devenir des amis et ne vont plus se quitter. D’ailleurs, pour la petite anecdote, les deux hommes sont nés dans la même ville et dans le même hôpital.

C’est avec Bruce Campbell que Sam Raimi va faire ses premières armes. Les deux hommes décident de monter des petits films amateurs, tournés en Super 8, Sam Raimi à la caméra et Bruce Campbell jouant l’acteur.

Avec un troisième ami, Robert Tapert, les deux hommes commencent à organiser leurs propres projections, avec distribution de soda et de popcorn, comme des vrais pros et récoltant les critiques à la sortie, histoire de s’améliorer.

Vers la fin des années 70, les trois amis s’empressent de réaliser des courts métrages, à petits budgets. Les acteurs sont des amis de lycée, qui jouent pour s’amuser. Et en 1978, Sam Raimi décide de réaliser un court métrage plus élaboré, plus travaillé, qui sera le point de départ et la source d’argent d’Evil Dead. C’est ainsi que les trois compagnons commencent le tournage de Within The Woods, qui reprend le scénario d’Evil Dead, avec un premier rôle féminin et Bruce Campbell incarnant une force démoniaque. Within The Woods sert de screen test aux futurs producteurs.

Le film sous le bras, accompagné de ses deux fidèles amis, Sam parcourt le Michigan, démarchant les producteurs potentiels. Dans un premier temps, les réactions sont timides, voire indifférentes. Sam sollicite, alors, tous ceux qui peuvent avoir un peu d’argent, comme les dentistes, les médecins, les coiffeurs, les avocats… En gros, il est l’inventeur du Crow funding non virtuel. Comme quoi, l’on a rien inventé ! Et ça marche ! Le réalisateur obtient l’accord de réaliser son film.

En 1979, Sam Raimi, après avoir écrit un scénario minimaliste, installe sa caméra et convoque Bruce Campbell pour le premier rôle ainsi que d’autres acteurs, tous débutants. Le tournage est prévu pour durer quelques semaines or il s’étalera sur 12 mois.

Sam Raimi connaît des contraintes de temps et d’argent. Parfois, il est obligé de filmer des heures la nuit. L’équipe s’octroie de courtes pauses pendant la journée, puis recommence le soir. Les actrices se plaignent de ce rythme infernal. Quant à Bruce, le fidèle compagnon, il est dans son élément. Sur le plateau, la bonne ambiance règne entre les deux compagnons. Entre les prises, ils se lancent des blagues, décompressent. Le budget serré ne permet pas d’éviter certains problèmes, notamment ceux des effets maquillages. Pour les résoudre, Sam aura recours au fameux système D, à son imagination et surtout à la générosité des proches, comme sa mère qui lui prêtera la voiture que l’on voit dans le film.

Le tournage s’interrompt pendant 4 mois et reprend toujours à un rythme effréné.

Une fois achevé, le film passe sur la table de montage, avant d’être finalisé en 1981, après de longs mois de travail pour peaufiner les détails.

Enfin, en octobre 1981, le film est diffusé aux États-Unis et tout de suite la mayonnaise prend. Après la première projection, les spectateurs sortent indignés, d’autres fascinés, mais on parle du film, et c’est bien là le plus important.

Les fans de films d’horreur voient dans Evil Dead une œuvre emblématique, de celle qui va révolutionner le genre.

En mai 1982, Evil Dead est projeté au Festival de Cannes, où il fait une entrée très remarquée. Stephen King l’adore et le défend.

Evil Dead est devenu un mythe, a créé un mythe et par la même occasion une icône, incarnée par Ash, le personnage joué par Bruce Campbell. Il contourne les conventions et les usages des films du genre, en amenant un décor unique, des personnages sans psychologie, sauf le héros qui a un profil, un sens du rythme détonnant, des travellings à tout va, des mouvements de caméra tout à fait délirants…

C’est simple, Evil Dead est l’exact opposé des films fantastiques anglais des années 70 où tout est suggéré, tout est lent. Que l’on aime ou l’on n’aime pas, le film ne laisse pas indifférent. Ici, il se passe tout le temps quelque chose, le spectateur n’a pas le temps de souffler, les temps morts sont bannis. Les effets sonores sont audacieux, une place majeure est accordée au hors champ.

Sam Raimi tente tout et réussit tout. C’est un génie. Il réinvente la « shaky camera », ce qui lui permet de donner une impression de vitesse aux images, comme celles des scènes dans la forêt. Le réalisateur fait preuve d’une grande technicité et de beaucoup d’imagination. On retiendra des mouvements de caméra hallucinants, son sens du cadrage et de l’espace remarquable pour l’époque. Du jamais vu. Le film présente une vraie singularité et réinvente le style.

Le scénario, minimaliste, se résume vite et évoque des choses concrètes : cinq jeunes dont le séjour dans une cabane isolée va virer au cauchemar, la peur de la solitude, la peur de la forêt, la peur du noir, la peur de la disparition de ses amis, leur mise à mort…

Evil Dead est tout sauf un film monotone ou une parodie d’un quelconque film d’horreur. Dans Evil Dead, on n’a jamais d’impressions de déjà-vu. Le plan répétitif du nuage noir qui masque la lune est un des éléments qui montre le génie de Sam Raimi, puisqu’il renforce l’idée de personnages sous influences, dont l’intérieur se détériore par la faute d’un lent poison.

Raimi fait exploser son génie visuel dans les plans de plongée et contre-plongée qui renvoient à cette source maléfique enfouie dans la cabane.

Le personnage principal, Ash, change de caractère au fur et à mesure des évènements. D’abord calme et posé, le plus sérieux de la bande d’amis, il évolue très vite, n’hésitant pas à recourir aux armes et à donner des coups de pelle à la femme qu’il aime. C’est un revirement à 360°. Revirement marqué par le maniement de la caméra, dans une scène, à 360°, geste d’une incroyable technicité. Cette scène, où la caméra tourne autour de Ash de haut en bas, montre combien le personnage a changé. Le tout bien sûr, amplifié par les effets sonores.

La caméra, au début du film, montre les peurs des personnages. Petit à petit, son emplacement évolue, afin de montrer leur changement d’attitude face au danger. Elle se fond à l’ambiance chaotique qui règne dans la cabane, aux bouleversements des repères temporels et physiques évoquant la décomposition des corps.

La force du film tient aussi à l’approche qu’a choisie Sam Raimi pour montrer l’entité en présence, cette puissance invisible et présente à la fois. La caméra se fait subjective, comme si l’entité poursuit ses proies en traversant les portes, en brisant les fenêtres.

Les vingt dernières minutes du film sont d’une redoutable efficacité, reposant sur des dispositifs sonores et esthétiques qui jouent à contresens des usages, le cadrage ne correspond plus à rien de ce qui s’était fait jusqu’à alors. Le tout fait plonger le spectateur dans la folie pure.

Bien entendu, toute cette peur si bien filmée, ce décalage entre la banalité des débuts et le chaos horrifique de la fin ne seraient rien sans la composition bluffante de Bruce Campbell qui reste le plus crédible possible, avant de se lâcher dans le deuxième volet.

Et aussi, soulignons la merveilleuse équipe entourant Sam Raimi, qui ont su faire de ce film un chef d’œuvre.

 

Pour son coup d’essai, Sam Raimi a signé un coup de maître. Evil Dead sera exploité en vidéoclub au début des années 1980 et rencontrera un très grand succès. Il faut dire que la jaquette était très attractive. Evil Dead est certainement le meilleur film de Sam Raimi, un film de potes devenu légendaire, un film de fan boy, jouissif et éternel. Un film qui continue de traverser les âges. Alors oui, on peut le trouver vieilli et rire de certaines scènes (comme celle où le Livre des Morts brûle dans la cheminée), mais la technique pour l’époque est remarquable. Perso, j’adore, même si aujourd’hui, le film me fait moins peur qu’avant.

 

Marie d’Ange

 

Pour aller plus loin

 

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